Faire corps et lutter pour
Comme tout le monde sans doute, je me demande “comment tenir quand rien ne tient”. C’est le prochain chapitre pour moi, pour nous je crois. Alors, Frédéric n’avait pas fini sa phrase que j’avais déjà dit oui. D’abord il m’impressionne depuis des années. Frederic a des idées XXL, sur des sujets connexes aux miens - la jeunesse et ses options, son émancipation. Surtout il les tient dans le temps. Frédéric n’est pas dans la pause. Et ce n’est pas tout le monde.
Ensuite c’est un projet de famille, porté avec son épouse, Géraldine, médecin gériatre - qui sait ce que prendre soin veut dire - et leurs enfants, qui ont l’âge des miens. Aujourd’hui, c’est clé d’aligner nos engagements et d’embarquer nos cercles les plus proches. De redistribuer les rôles dans notre propres familles tant les guides, les sachants ne sont pas toujours celles et ceux que l’on croit.
Enfin il y a le projet, l’intention, comme un coup de poing sur la table, un pavé dans la mare. Non seulement j’adore mais c’est juste. En tout cas j’en suis là. Cela fait 20 ans que j’essaie de dénoncer la façon dont notre système broie tout ce qui veut vivre (Nature, humains, idées). Cela fait 15 ans que j’essaie de mettre en lumière celles et ceux qui proposent des “autrement”. 15 ans que je les vois batailler, s’épuiser, s’arrêter car trop seuls. En côtoyant leur colère et leur beauté, ils m’ont contaminée : sans doute suis-je devenue moi-même militante. Mais voilà, j’ai beau dénoncer la logique à l’œuvre partout, celle de la compétition, de la performance, du court terme, je me vois, je nous vois, nous disputer entre nous pour un peu d’attention, de financement, d’impact. On passe trop d’énergie à essayer d’exister souvent au détriment des autres. A croire que notre cause est plus importante qu’une autre, une action plus efficace qu’une autre. On a fini par souscrire aux logiques de performance, de compétition et d’ego. De silot. Ces attendus capitalistes gangrène l’économie sociale et solidaire. On a cédé, on incarne le problème, même dans nos combats. Nous nous retrouvons seuls, isolés, affaiblis. Piégés par cette logique de séparation que nous comptions dénoncer. Il faut la voir pour ce qu’elle est : une énième manipulation pour nous contrôler, nous affaiblir. Nous désactiver.
C’est vrai, une vague s’est tarie et le militantisme est à la croisée des chemins. Il est temps tenter de s’en sortir par le haut, de comprendre que ce qui nous tient, c’est avant tout un système de représentations, des croyances. A commencer par celle de notre séparation. Il est temps de nous en affranchir, de comprendre l’interdépendance de tout en tout, les liens entre nous. Et de l’incarner. Il n’y a pas une cause plus grande que l’autre, une proposition plus importante que l’autre, une façon de faire plus efficace que l’autre. Nous tâtonnons oui. Mais nous sommes vivants. Et tout compte. C’est une courbe d’apprentissage et la même bataille. Et nous tiendrons en nous rassemblant, en nous réconciliant. Nous tiendrons en faisant corps.
Il y a quelque chose à vivre, de l’ordre du dépassement du quant à soi, au service de quelque chose de plus grand que soi, que nos temps absurdes. Créer, resserrer, magnifier les liens entre nos combats et entre nous. On bascule oui. Il est temps de nous rassembler, de préserver notre feu et notre joie, d’apprendre les uns des autres, pour espérer faire sens, faire face. Faire poids. Et, ensemble, de nous mettre à lutter pour.
Merci Frédéric et Géraldine de croire que je peux aider. JOIN FORCES, faire corps, c’est avant tout faire famille.
Flore Vasseur